Le transport maritime
Le rebond de la croissance ayant encore reculé à 3 % en 2023 (3,5 % en 2022), inférieure à ce qu’elle était avant la crise (moyenne de 3,8 % sur la décennie 2010-2019) en raison de la combinaison des tensions géopolitiques, des sanctions et d’une inflation toujours élevée.
Malgré ce tassement de l’économie, le transport maritime a fait preuve d’une bonne tenue avec un rebond de 2,4 % par rapport au tassement observé en 2022. Toutefois, il s’agit en partie de l’effet sur les tonnes.kilomètres constatés en raison du rallongement des routes imposé par le conflit en mer Rouge ou le niveau insuffisant du canal de Panama. Les transports de vrac sec et de produits pétroliers ont principalement bénéficié de cette situation, tandis que le transport de conteneurs restait en léger recul.
(source : BRS Revue annuelle 2022)
Les taux de fret, après les pics atteints en 2021 et encore soutenus en 2022 sont revenus aux niveaux moyens décennaux d’avant crise du COVID tant pour le crac sec que pour les hydrocarbures et les conteneurs. Les marchés sont néanmoins restés très volatils et le marché des hydrocarbures perturbé par les sanctions contre la Russie et leur détournement par la flotte noire « black fleet ». Ces navires, qui échappent à tous contrôle du pavillon ou du port représentent par ailleurs un risque croissant pour la sécurité maritime.
Les croisiériste ont su faire preuve durant la crise de la COVID pendant laquelle toute activité a été stoppée, d’une remarquable capacité d’adaptation qui lui a permis de retrouver la profitabilité dès la reprise amorcée en 2022 et renouer avec le record de réservations en 2023. Plusieurs évènements historiques ont marqué la croisière en 2023. La mise en service de l’Icon of the Sea par la compagnie Royal Caribbean Cruise Lines marque avec un déplacement de 250 000 Gt et une capacité de 7600 passagers un nouveau record de gigantisme de ce type de navires. Le chantier Shanghai Waigaoqiao Shipbuilding a livré le premier grand navire de croisière (135 000 Gt) construit en Chine, confirmant ainsi les ambitions de ce pays sur ce segment. Enfin, de grandes compagnies hôtelières comme Ritz Carlton, Four Seasons ou Accor ont fait leur entrée dans cette activité renouant avec l’ancienne tradition de grand luxe des paquebots.
En 2023, la flotte mondiale a continué sa croissance à 2 213 millions de tjb à fin décembre 2023 (contre 2 143 un an plus tôt) soit + 3,3%.
(source : BRS Revue annuelle 2024)
Décarbonation
En 2023, tant l’OMI que l’Union européenne ont révisé leurs objectifs de décarbonation du transport maritime, visant à présent le net-zéro émissions de GES à l’horizon de 2050.
En juillet 20213, le MEPC 80 (Maritime Environment Protection Committee) a adopté différents textes relatifs à la décarbonation du transport maritime :
- Guidelines sur l’utilisation des biocarburants, et leur prise en compte dans le CII (Carbon Intensity Index),
- Continuation des travaux sur la captation du CO2 à bord (OCC, On-board Carbon Capture),
- Adoption de la Révision 2023 de la stratégie de l’OMI sur les gaz à effet de serre (GES), voir ci-après ; cette stratégie sera revue durant les réunions MEPC 86 à 88, attendues les étés 2027 à 2028,
(Source: DNV Maritime Forecast 2023 - 2050)
- Adoption des « LCA Guidelines » : guidelines sur l’intensité en GES des carburants maritimes en prenant en compte leur cycle de vie complet « du puits au sillage », voir ci-après,
L’Union eurpéenne , pour sa part, a continué à préciser sa réglementation à travers les dispositifs FuelEU Maritime et ETS (Emission Trade System) :
- Directives 2023/957 et 2023/959 : les activités de transport maritimes rejoignent le système EU ETS « Emissions Trading System », bourse d’échange des émissions de GES
- Entrée en vigueur en 2024
- Porte sur 40% des émissions en 2024
- Règlementation 2023/1805 : FUEL EU MARITIME
- Impose progressivement l’utilisation de carburants renouvelables
et bas-carbone dans le transport maritime - Porte sur 100% du carburant utilisé entre deux ports de l’Union,
50% du carburant utilisé entre vers ou depuis l’Union - Entrée en vigueur en 2026, sur les émissions de l’année 2025,
Ce cadre réglementaire évolutif ne manque pas de soulever de nombreuses inquiétudes, notamment quant à l’application équitable de ces dispositions à l’ensemble du transport maritime international et pas ailleurs aux sources de financement nécessaire pour cette transition. Ainsi au niveau européen, les revenus de l’ETS ne sont toujours pas affectés à la transition énergétique du maritime.
Le mode de propulsion est devenu un casse-tête pour les propriétaires de navires. La proportion de navires équipés de propulsion dual-fuel (hors DF-ready) sur le total des commandes continue d’augmenter passant de 174 navires (15 %) en 2020 à 509 navires (27,6 %) en 2023. Cependant cela ne constitue qu’entre 1 et 2 % de la flotte en service, signifiant qu’il faudrait à ce rythme plus de 50 ans pour renouveler complètement la flotte. Cela traduit bien l’incertitude dans laquelle se trouvent aujourd’hui les acteurs industriels et financiers sur cette transition.
(Source : BRS Revue annuelle 2024)